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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome XI.djvu/478

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tout les biens à venir, parce que sont venus sur nous les maux qui devaient arriver d’après les prédictions. Si les maux prédits n’étaient point arrivés, ils nous rendraient incrédules au sujet des biens ; mais les maux sont accomplis pour nous faire croire aux biens de la vie future.

11. Tel est le monde ici-bas ; c’est un pressoir qui foule. Mais si tu n’es que le marc impur, tu vas aux cloaques ; si tu es l’huile, tu es recueilli dans le vase. Il faut en effet qu’il y ait un pressoir. Voyez plutôt le pressoir et voyez l’huile. Le pressoir foule quelquefois dans le monde ; ainsi, c’est la famine, la guerre, la disette, la pauvreté, la mortalité, les pillages, l’avarice, la misère des pauvres, les calamités des villes. C’est tout cela, et nous le voyons. Tout cela est prédit, et nous le voyons s’accomplir. Or, au milieu de ces calamités, nous entendons des hommes qui murmurent et qui disent : Combien de malheurs depuis que le monde est chrétien ! Avant qu’on ne fût chrétien, quelle abondance de richesses ! Nous n’avions pas à subir tant de calamités. C’est le marc sortant du pressoir, et coulant au cloaque. Aussi sa bouche est-elle noire de ses blasphèmes ; il n’a nulle beauté, tandis que l’huile a un certain éclat. Nous rencontrons un autre homme qui sort du pressoir, de dessous cette meule qui l’a broyé. S’il est tout disloqué, n’est-ce point l’effet du pressoir ? Après avoir entendu le marc, prêtez l’oreille à l’huile. Grâces au Seigneur ! Que votre nom soit béni, ô mon Dieu ! Tous ces maux dont vous nous accablez étaient prédits. Nous voici dans la certitude que les biens viendront aussi. Quand vous nous redressez ainsi que les méchants, c’est votre volonté qui s’accomplit. Nous trouvons en vous un Père dans vos promesses, un Père encore dans vos châtiments. Redressez-nous, et rendez-nous l’héritage que vous nous avez promis pour la fin. Nous, bénissons votre saint nom, parce que le mensonge ne fut jamais en vous. Toujours vous avez dirigé les événements selon votre prédiction. C’est au milieu de ces bénédictions qui s’échappent du pressoir, que l’huile s’écoule dans les vases. Et toutefois, comme le monde entier n’est qu’un pressoir, on en tire une autre comparaison. De même que c’est dans la fournaise que l’on éprouve l’or et l’argent, de même c’est au feu de la tribulation que le juste est mis à l’épreuve ; et le creuset de l’orfèvre nous fournit cette comparaison. Dans cet étroit creuset, nous trouvons trois choses : le feu, l’or et la paille ; et voilà ce qui nous donne l’image du monde entier. Il y a dans le monde, en effet, et de la paille, et de l’or, et du feu ; de la paille qui est brûlée, du feu qui embrase, de l’or qui est éprouvé. De même, en ce bas monde, on rencontre partout des justes, des impies et la tribulation. Le monde ressemble à la fournaise de l’orfèvre, les justes à l’or, les impies à la paille, et la tribulation au feu qui embrase. Pourrait-on purifier l’or si la paille n’était brûlée ? De là vient que les impies sont réduits en cendres. Ils ne sont que cendres en effet, quand ils blasphèment, quand ils murmurent contre Dieu. Ils sont un or épuré, les justes qui supportent patiemment toutes les calamités de cette vie, qui bénissent le Seigneur au milieu de leurs tribulations, et que Dieu met dans ses trésors comme un or précieux. Car Dieu a des trésors où il met l’or épuré, de même qu’il a des égouts pour jeter les cendres de la paille. Or, il redemande pour lui tout ce qui est en ce monde. Vois ce que tu es, car il faut que le feu vienne. S’il trouve que tu sois de l’or, il épurera en toi les scories ; s’il trouve que tu sois de la paille, il te consumera et te réduira en cendres. Choisis le sort que tu veux subir ; car tu ne saurais dire : J’éviterai le feu. Te voilà dans le creuset de l’orfèvre, où le feu viendra nécessairement ; et il est plus nécessaire encore que tu y sois, puisque tu ne saurais éviter le feu.

12. Pourquoi donc, mes frères, ne pas croire que la fin du monde arrivera, ainsi que le jour du jugement, afin que chacun de nous reçoive selon ses œuvres en cette vie, bonnes ou mauvaises ? Quand nous voyons s’accomplir, se manifester, et nous arriver tant de promesses faites, pourquoi, pendant notre vie, ne point choisir le parti qui nous fera vivre toujours ? Ainsi, parce que nous avons été négligents, soyons diligents aujourd’hui. Car la négligence ne nous est jamais permise. Tu ne sais ce que demain sera pour toi. Dieu, dans sa patience, nous avertit de redresser et nous et notre vie, si elle a été mauvaise, et de faire un meilleur choix quand il en est temps. Pensez-vous que Dieu dort et ne voit point ceux qui font le mal ? En nous enseignant la patience, il nous en donne le