Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome XI.djvu/667

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2. Rappelons-nous les événements du passé, souvenons-nous aussi de ce qu’ont annoncé les Écritures. Cet homme est-il le Verbe de Dieu ? « Le Verbe » de Dieu « s’est-il fait chair » dans le temps, « et a-t-il habité parmi nous ? » Avant qu’il se fît chair et qu’il habitât parmi nous, ce Verbe a-t-il parlé par l’organe des Prophètes ? Évidemment, Dieu a parlé à Abraham par son Verbe ; il lui a prédit que ses descendants voyageraient sur une terre étrangère, et, pourtant, à ce moment-là, Abraham était avancé en âge, et Sara était vieille et stérile. Les deux vieillards crurent à cette prédiction, et elle s’accomplit. Leur race, c’est-à-dire le peuple issu d’eux selon la chair, devait rester comme esclave en Égypte pendant quatre cents ans : elle y est restée. Elle devait être délivrée de cette captivité elle en : a été délivrée. Elle devait entrer en jouissance de la terre promise : elle y est entrée. Des événements ont été prédits pour des temps singulièrement reculés et pour des époques peu lointaines ; ces événements se sont réalisés : nous voyons même, aujourd’hui, s’en opérer l’accomplissement. La parole du Seigneur s’est fait entendre par des prophètes. Elle a annoncé que la nation juive offenserait Dieu et qu’elle tomberait au pouvoir de ses ennemis en punition de ses crimes ; c’est ce qui est arrivé ; qu’elle serait emmenée captive à Babylone : cela s’est vérifié ; que le Christ-Roi sortirait de son sein ; or, le Christ est venu, et il est né ; rien d’étonnant en cela, puisque c’était la Parole elle-même qui avait annoncé d’avance son propre avènement. Il a été prédit que les Juifs crucifieraient le Christ : ils l’ont crucifié ; qu’il ressusciterait et serait glorifié : c’est fait, il est sorti vivant du tombeau, et monté au ciel ; que toute la terre croirait en son nom, et que les rois persécuteraient son Église : rien de plus réel ; que les princes croiraient aussi en lui : notre foi se trouve être déjà celle des rois, et nous élevons encore des doutes sur la foi chrétienne ? Il a été prédit que des hérétiques seraient retranchés de l’Église ; ne voyons-nous pas, de nos jours, des hérésies ? Ne gémissons-nous pas à les entendre hurler tout autour de nous ? Les Prophètes ont dit que les idoles disparaîtraient sous les efforts de l’Église et l’influence exercée par le nom du Christ ; qu’il y aurait, dans la société des fidèles, des scandales, de la zizanie, de la paille : n’est-ce pas là ce que nous voyons de nos yeux ? n’est-ce pas là ce que nous endurons avec le plus de courage possible, avec la force d’âme que nous communique le Seigneur ? En quoi as-tu été trompé par celui qui t’a prédit tous ces événements ? Fie-toi donc à sa parole, si tu es fidèle ; marche à droite. Avec les preuves convaincantes que me donne celui qui te parle, d’après la réalisation de ses paroles, j’apprends à le connaître, puisque c’est ainsi qu’il a daigné se faire connaître à moi. Si tout ce qu’il me dit est absolument vrai, il ne m’induit pas en erreur or, tous les événements qu’il me prédit, je les reconnais comme incontestables : il ne m’a imposé en rien : je le reconnais pour la Parole de Dieu. Quand il m’a parlé par la bouche de ses serviteurs, il ne m’a pas trompé, et lorsqu’il me parle par sa propre bouche, il me tromperait ? Pour celui qui ne connaît pas encore le Christ, et qui doute de lui, il doit se dire aussi : J’irai à droite, car, enfin, le monde tout entier croit déjà en lui, et il dit peut être la vérité.

3. Mes frères, il yen a beaucoup pour ne pas croire et ne pas écouter les oracles des saints Pères : il en sera d’eux comme de la multitude qui vivait au temps de Noé. Il n’y eut alors de sauvés que ceux qui se trouvèrent dans l’arche. Si les malheureux pécheurs avaient pris la peine de réfléchir, s’ils avaient abandonné leurs voies impies et s’étaient convertis à notre Dieu, s’ils avaient cherché à réparer leurs fautes et imploré sa miséricorde, il est sûr qu’ils n’auraient point péri. Dieu, en effet, ne s’est pas montré dur à l’égard des Ninivites ; il leur a suffi de trois jours pour obtenir leur pardon. Trois jours ne sont-ils pas bientôt écoulés ? Néanmoins, avec un laps de temps si court, ils n’ont pas désespéré de la bonté divine ; ils se sont bâtés de fléchir sa clémence. S’il a suffi d’un espace de trois jours à cette ville immense pour obtenir le pardon du Très-Haut, les hommes du temps du déluge n’auraient-ils pas eu assez de cent, deux cents et trois cents ans employés à la construction de l’arche ? Si, depuis que le Christ a commencé à couper, dans la forêt des nations, les bois incorruptibles qui devaient entrer dans l’édification de son Église, les hommes incrédules avaient changé de voie et de mœurs, s’ils avaient offert à Dieu le sacrifice propitiatoire d’un cœur contrit et humilié,