Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome XI.djvu/674

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Comme nous le dit l’Apôtre:« Vivons avec sobriété, justice et piété en ce monde, en attendant le bonheur que nous espérons et l’avènement du grand Dieu[1] ». Que l’apparence trompeuse des biens passagers d’ici-bas ne nous induise point en une fausse sécurité ; que les charmes de la terre ne nous arrêtent pas dans l’accomplissement de l’œuvre de Dieu ; soupirons plutôt après les choses du ciel ; débarrassons-nous, parles gémissements de la pénitence, du fardeau de nos fautes ; puissent nos bonnes œuvres nous donner l’espérance des joies de l’éternité ! Alors nous attendrons avec crainte et tremblement le Sauveur, Notre-Seigneur Jésus-Christ, à qui appartiennent la gloire et l’honneur, pour les siècles des siècles. Ainsi soit-il.

VINGT ET UNIÈME SERMON. POUR LA NATIVITÉ DU SEIGNEUR. I

ANALYSE. —1. Les deux naissances du Christ. —2. Il s’est abaissé pour nous relever. —3. Le Christ enfanté par une Vierge.'

1. Notre-Seigneur est né aujourd’hui, aussi le Prophète invite-t-il toutes les créatures à se réjouir ; il s’écrie : « Que les cieux soient dans la joie ! que la terre tressaille d’allégresse ! que la mer et tout ce qu’elle renferme bondisse de bonheur[2] » Par les cieux, il faut entendre aujourd’hui les chœurs des anges, qui sont assis dans le ciel, et qui, en ce jour, font entendre aux bergers attentifs ce beau cantique : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté[3] ». La terre est le symbole de la nature humaine. Quant à la mer, elle représente le monde entier, et, par tout ce qu’elle renferme, l’Écriture nous indique ceux pour qui ce jour de la nativité du Christ doit être la source d’une joie inexprimable. Le Christ est né d’une Vierge, afin que nous naissions de l’Esprit-Saint ; Celui qui a été engendré du Père avant tous les siècles est né aujourd’hui de la Vierge Marie. Sa Mère lui a donné le jour, mais il est resté dans le sein de son Père. Car si Celui qui est éternel est devenu ce qu’il n’était pas, il n’a pas cessé d’être ce qu’il était : il n’était pas homme, et il s’est fait homme, selon cette parole de l’Apôtre : « Il a été formé d’une femme, il s’est assujetti à la loi, pour racheter ceux qui étaient sous la loi[4] ». Mais il était Dieu, et il est resté ce qu’il était. Sa naissance selon la chair nous a été utile sans lui faire tort ; car elle nous a procuré la grâce de devenir les enfants adoptifs de Dieu, et il a continué à rester Dieu avec son Père.

2. Tout grand qu’il était, il s’est abaissé afin de nous relever ; car nous étions courbés vers la terre. Et de fait, avant l’avènement du Seigneur, la nature se trouvait courbée sous1ç fardeau de ses péchés qui l’écrasait. si elle s’était pliée jusqu’au niveau du péché, elle avait agi de son propre mouvement, mais elle était, par elle-même, incapable de se relever. L’homme ne supportait pas, sans gémir, les tristes inconvénients de cette courbature ; aussi le saint Prophète s’en plaignait-il avec amertume dans l’un de ses psaumes : « Je

  1. Tit. 2, 13.
  2. Psa. 97, 7.
  3. Luc. 2, 14.
  4. Gal. 4, 4.