Page:Augustin Crampon - Les quatre Evangiles, Tolra et Haton, 1864.djvu/411

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loppant, elles mirent, sur beaucoup de points, leurs auteurs en contact avec le christianisme. Les gnostiques de la première classe enseignaient un Dieu supérieur, pur esprit, relégué dans les abîmes de son essence et sans relation immédiate avec le monde[1] ; des Forces ou Puissances, appelées Æons, émanent de lui de moins en moins pures, de telle sorte qu’à un certain degré elles pouvaient entrer en contact avec la matière. C’est un de ces Æons, relativement dégradés, qui fut le formateur, le créateur du monde, le Démiurge : ce qui explique pourquoi son œuvre n’était pas meilleure, et comment on y trouvait le mal. Jésus est le fis du Démiurge, né comme les autres hommes de l’union de Joseph et de Marie, et resté homme jusqu’au baptême. Alors l’Être primitif et souverain fit descendre en lui, sous la forme d’une colombe, un Æon d’une nature supérieure, le Christ ou le Verbe : c’est ainsi que le Christ s’unit à Jésus, qui dès lors annonce le Père inconnu et fait des miracles. Mais le Christ est impassible : au moment de la passion, il quitte Jésus, et c’est l’homme seul qui souffre, meurt et ressuscite. Tel était le système de Cérinthe, juif d’origine, qui se trouvait à Éphèse en même temps que saint Jean[2] ; tel était sans doute celui des nicolaïtes ou balaamites, sur lesquels nous avons moins de détails[3]. — Les gnostiques de la deuxième classe, aux yeux de qui la matière était mauvaise, regardaient comme impossible une incarnation réelle

  1. D’où ses noms : Abyme, Inconnu, Innommé, Primordial, premier Père.
  2. Saint Épiphane, Hæres. xxviii, 2 ; saint Irénée, Adv. Hæres. I, xxvi, 1.
  3. S. Épiphane, Hær. xxvi, 9 ; Irén. ibid. iii, xi, 1-4 ; Tertullien, de Præscr. xxiii, 46 ; II Pierre, ii, 1, 15 ; Jud. 11 ; Apos. ii, 6, 14.