Page:Augustin Crampon - Les quatre Evangiles, Tolra et Haton, 1864.djvu/415

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l’absence de certains faits, il résolut de combler ces lacunes. » Dès le iie siècle, saint Jean, quoique le dernier des Évangélistes dans l’ordre des temps, était mis par les Pères au premier rang pour la richesse du fond et la sublimité. C’est pour lui que saint Irénée, parmi les quatre animaux symboliques d’Ézéchiel, réserve le royal symbole de l’aigle[1], parce que dès le début de son Évangile, semblable à l’aigle, il s’élève dans le sein même de Dieu pour y saisir le mystère de la génération du Verbe et le révéler aux hommes. Cette sublimité, cette science divine, qui fait le caractère propre de notre apôtre, et l’a fait surnommer le théologien, non-seulement les Pères la reconnaissent et l’admirent, mais ils tâchent de l’expliquer. Selon saint Jérôme et saint Ambroise, ce qui donna à l’esprit de saint Jean cette impulsion sublime vers la lumière, c’est la virginité perpétuelle ; elle fut le lien mystérieux de l’union qui exista entre Jésus et lui. Écoutez saint Grégoire de Nysse : « Jean, épris d’amour pour le Verbe, se reposa sur son sein pendant la Cène, et, appliquant alors son cœur sur le cœur de son Maître, comme pour aspirer les eaux de cette fontaine de vie, il reçut par une ineffable communication la pleine connaissance des mystères du Christ, si bien que nous offrant à son tour un trésor qui déborde, il nous remplit de la sève qu’il a puisée à la source divine, et nous fait entendre d’une voix solennelle des prédications où retentit toujours la voix du Verbe lui-même[2]. » Ainsi ces différences entre saint Jean et les synoptiques, où le rationalisme a cherché des armes contre l’autorité du quatrième Évangile, étaient

  1. Adv. Hær. iii.
  2. Homil. i in Cantic.