Page:Augustin Crampon - Les quatre Evangiles, Tolra et Haton, 1864.djvu/419

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thenticité, et les historiens de la philosophie s’accordent maintenant à penser que Platon, quoique plus spéculatif, nous donne, aussi bien que le populaire Xénophon, une idée vraie de l’enseignement socratique[1]. Qui ne sait que, après une même leçon, un même enseignement donné, certaines faces de la vérité auront été plus clairement aperçues, plus puissamment saisies par certains auditeurs, pour lesquels d’autres faces, aperçues par d’autres auditeurs, seront restées plus ou moins dans l’ombre ? Cela tient à la force de conception, aux facultés dominantes qui diffèrent selon les individus. Or, Jean était une de ces âmes qui se fondent, par un abandon intime, avec la personnalité de leur maître, une âme comme celle de Marie, par opposition à celle de Marthe, élevée, contemplative, que la nature et la grâce avaient préparée à l’intelligence plus parfaite des vérités pures : quoi d’étonnant qu’il ait compris et recueilli de l’enseignement commun du Maître bien des choses qui avaient moins frappé les autres ?

Les différences, d’ailleurs, entre le ton de saint Jean et celui des synoptiques, ont été souvent exagérées dans des intentions hostiles à la foi. À côté de passages d’une incomparable grandeur, on trouve dans le quatrième Évangéliste des paraboles simples et touchantes, comme celles de la Vigne et du Bon Pasteur, des récits d’une candeur ineffable ; quoi de plus ingénu pour la forme que le dialogue de Nicodème, et la conversation de la Samaritaine près du puits de Jacob ? D’autre part, saint Jean n’a pas le monopole

  1. Brandis, Ritter, Hegel. Un écrivain dont la tendance est complétement pratique, peut donc rester, comme Xénophon, étranger au côté idéal de son maître.