Page:Augustin Crampon - Les quatre Evangiles, Tolra et Haton, 1864.djvu/420

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exclusif des idées chrétiennes sur les rapports mystiques du Père avec le Fils, du Sauveur avec les fidèles. Saint Matthieu a des sentences toutes pareilles, qu’on dirait empruntées à notre Évangile, celle-ci, par exemple : « Toutes choses m’ont été données par mon Père. Nul ne connaît le Fils, si ce n’est le Père ; et nul ne connaît le Père, si ce n’est le Fils, et celui à qui le Fils a voulu le révéler (xi, 27. Comp. Matth. xviii, 20 ; xxviii, 20). »

Enfin, il est facile de rendre compte de ces différences. Outre les raisons générales déjà indiquées, il en est d’autres qui se tirent, soit du choix des matériaux auquel le quatrième Évangéliste crut devoir s’arrêter, soit des adversaires qu’il avait à combattre. Saint Jean, nous l’avons dit plus haut, s’attache surtout à reproduire les enseignements de Jésus pendant ses divers séjours dans la capitale de la Judée, où plus d’une fois il dut entrer en discussion avec les plus savants docteurs de la nation. Or, n’est-il pas naturel que, répondant aux arguties des Scribes et des Pharisiens, le Sauveur ait employé d’autres expressions, une autre méthode, qu’en instruisant les populations simples et pauvres de la Galilée ? Qui ne comprend que dans un entretien avec les principaux lettrés, ou bien encore dans le commerce de l’intimité avec ceux qu’il destinait à prêcher sa doctrine, avant de se séparer d’eux, à la dernière Cène par exemple, qui ne comprend, dis-je, que Jésus ait enseigné des vérités qu’il ne livrait pas d’ordinaire à la multitude, du moins sous une forme aussi élevée ? Qu’on se rappelle, en outre, les adversaires que saint Jean avait à réfuter. C’est précisément à Éphèse, ville lettrée, que le gnosticisme commença à s’insinuer dans le christianisme, non pour