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Page:Augustin Crampon - Les quatre Evangiles, Tolra et Haton, 1864.djvu/459

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vant[1] qui suis descendu du ciel. Si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement ; et le pain que je donnerai est ma chair, livrée pour le salut du monde[2]. Les Juifs donc disputaient entre eux, disant : Comment celui-ci peut-il nous donner sa chair à manger ? Et Jésus leur dit : En vérité, en vérité, je vous le dis, si vous ne mangez la chair du Fils de l’homme, et ne buvez son sang, vous n’aurez point la vie en vous[3].

  1. Non comme la manne, inanimée et corruptible, mais vivant et donnant la vie ; le contexte semble exiger cette dernière signification.
  2. En grec, ma chair, que je donnerai, livrerai à la mort pour le salut du monde. C’est-à-dire, la même chair qui sera immolée sur la croix pour le salut du monde, je la donnerai, sous les apparences du pain, en nourriture à chaque fidèle dans le sacrement de l’Eucharistie. En grec le vers. 52 est réuni au vers. 51, en sorte que la Vulgate a, dans ce chap., un vers. de plus que le texte grec.
  3. Après avoir rapproché de ce verset les paroles mêmes de l’institution : Prenez et mangez, ceci est mon corps… Buvez-en tous, ceci est mon sang (Matth. xxvi, 26-28 ; Marc, xiv, 22-24 ; Luc, xxii, 19, 20), Bossuet ajoute : « De dire qu’il n’y ait pas un rapport manifeste dans ces paroles, que l’une n’est pas la préparation et la promesse de l’autre, et que la dernière n’est pas l’accomplissement de celle qui a précédé, c’est vouloir dire que Jésus-Christ, qui est la Sagesse éternelle, parle et agit au hasard. » Un autre rapprochement nous paraît démontrer, d’une manière plus péremptoire encore, que l’interprétation catholique de ce passage est la seule admissible, la seule même raisonnable. L’auteur du quatrième Évangile écrivit certainement après la mort de saint Paul : or, saint Paul, dans sa première Épître aux Corinthiens (xi, 23 sv.), parle en détail de l’usage du sacrement de l’Eucharistie parmi les premiers fidèles ; après avoir rapporté l’institution de ce sacrement dans les mêmes termes que saint Luc, il ajoute : « C’est pourquoi quiconque mangera ce pain ou boira le calice du Seigneur indignement, sera coupable du corps et du sang du Seigneur. Que l’homme donc s’éprouve lui-même, et qu’il mange ainsi de ce pain et qu’il boive de ce calice. Car quiconque en mange et en boit indignement, mange et boit sa condamnation, ne discernant point le corps du Seigneur. » Certes, ces faits, cet usage de l’Eucharistie étaient connus de saint Jean ; il savait en outre que tous les fidèles avaient entre les mains les paroles de l’institution telles qu’elles se trouvent dans les synoptiques. Cela posé, le dernier Évangéliste, en rapportant les paroles de Notre-Seigneur qu’on vient de lire dans les vers. 52 et sv., leur suppose nécessairement le sens propre et naturel admis par l’Église. Si, dans sa pensée,