Page:Augustin Crampon - Les quatre Evangiles, Tolra et Haton, 1864.djvu/556

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qui hâtait la mort et pouvait être considéré comme une compensation de l’abréviation du supplice. On n’appliqua pas le crurifragium à Jésus-Christ, parce que les soldats qui en étaient chargés remarquèrent en lui les signes certains de la mort. Les souffrances qu’il avait endurées avant son supplice expliquent comment il avait rendu le dernier soupir quatre ou cinq heures après le crucifiement. Cependant l’un des soldats lui porta un coup de sa lance dans le côté : c’était, dans d’autres exécutions, le coup de grâce ordinaire. Il fut appliqué à Jésus pour éteindre la dernière étincelle de vie qui pouvait encore l’animer. La loi romaine livrait le corps des exécutés, sauf ceux des esclaves, à leurs parents, pour qu’ils le pussent ensevelir. C’est pourquoi Joseph d’Arimathie obtint sans peine ce qu’il demandait.

Le supplice de la croix subsista dans l’empire jusqu’à Constantin le Grand qui, par respect pour Notre-Seigneur Jésus-Christ, l’abolit la treizième année de son règne. — Kirchen-Lexicon, art. Crucifiement, par Ad. Maier.

Cyrinus (Recensement de). Tout ce qui se rapporte à cette question est traité de la manière la plus complète et la plus savante par Ph. E. Huschke (Ueber den zur Zeit der Geburt Christi gehaltenen Census), par M. Wallon (de la Croyance due à l’Évangile, p. 296 sv.) et par le P. Patrizzi (de Evangeliis, lib. III, diss. xviii) ; nous nous contenterons de donner ici un résumé de la discussion, empruntée au Kirchen-Lexicon de MM. Wetzer et Welte, art. Quirinius, par M. Schegg, le célèbre interprète des Évangiles.

Cyrinus, ou mieux Quirinius (Publius Sulpicius), sénateur romain très-illustre, après avoir été revêtu des plus hautes dignités sous César Auguste (Tacite, Annal. III, 48), fut, en dernier lieu, gouverneur de Syrie, et opéra en Judée un dénombrement auquel le peuple juif ne se soumit qu’après divers essais de résistance. Heureusement que l’autorité du grand-prêtre Joazar réussit à empêcher un soulèvement de la nation en masse. Josèphe (Antiq. xviii, 1) associe ce dénombrement à la déposition d’Archélaüs, et le place l’an 37 après la bataille d’Actium, 759 de Rome, 6 de l’ère vulg., et par conséquent 12 après la naissance de Notre-Seigneur. Ajoutons que ce dénombrement a dû être un des premiers actes de l’administration de Cyrinus comme préfet de Syrie, puisque son prédécesseur Volusius figure encore sur une monnaie comme préfet de Syrie, præses Syriæ, l’an 35 après la bataille d’Actium, c’est-à-dire deux ans auparavant.

Cela posé, comment faut-il expliquer le texte de saint Luc (ii, 1, 2) qui rattache la naissance de Jésus-Christ à Bethléem au recensement ordonné par Cyrinus ? Voici le texte de saint Luc :

Ἐγένετο δὲ ἐν ταῖς ἡμέραις ἐκείναις, ἐξῆλθεν δόγμα παρὰ Καίσαρος Αὐγούστου, ἀπογράφεσθαι πᾶσαν τὴν οἰκουμένην. Αὕτη ἡ ἀπογραφὴ πρώτη ἐγένετο ἡγεμονεύοντος τῆς Συρίας Κυρηνίου.

Factum est autem in diebus illis, exiit edictum a Cesare Augusto, ut describeretur universus orbis. Hæc descriptio prima facta est a præside Syriæ Cyrino.

On sait que Strauss a exploité cette contradiction apparente entre Josèphe et saint Luc pour rejeter comme contraire à l’histoire la relation du troisième évangéliste