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Page:Aulard - Histoire politique de la Révolution française.djvu/8

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l’ancien régime, de l’esprit laïque contre l’esprit clérical, du principe rationnel de libre examen contre le principe catholique d’autorité, voilà surtout en quoi consista la vie politique de la France.

D’autres faits eurent une influence, mais moins directe : ce sont par exemple les batailles, les actes diplomatiques, les actes financiers. Il est indispensable de ne les pas ignorer, mais il suffit de les connaître en gros et dans les résultats. Ainsi la victoire de Valmy, connue au moment de l’établissement de la République, facilita cet établissement, parce qu’elle amena la retraite des Prussiens. Si vous connaissez cet effet de la célèbre canonnade, vous en savez assez pour comprendre la partie de l’histoire politique qui en fut contemporaine, et il est inutile que je mette sous vos yeux le tableau des opérations militaires de Dumouriez. La paix de Bâle, en 1795, hâta en France l’établissement d’un régime intérieur normal : il suffit de connaître cet effet, sans entrer dans le détail des négociations ou des clauses. Le discrédit des assignats et l’agiotage amenèrent les conditions matérielles et l’état d’esprit d’où sortirent, en germinal et en prairial an III, deux insurrections populaires : il n’est pas indispensable, pour bien saisir cet effet politique, de pénétrer dans le dédale des finances de la Révolution.

J’ai donc laissé de côté l’histoire militaire, diplomatique, financière. Je ne me dissimule pas que c’est là une abstraction qui peut paraître dangereuse, et que je m’expose au reproche d’avoir faussé l’histoire en la tronquant. Mais toute tentative historique est forcément une abstraction : l’effort rétrospectif d’un esprit ne peut embrasser qu’une partie de l’immense et complexe réalité. C’est déjà une abstraction de ne parler que d’une période, et, dans une période, de ne parler que de la France, et, dans la Révolution, de ne parler que de la politique. J’ai tâché du moins de bien élucider les faits indispensables à la connaissance de cette politique, et, si j’avais dû élucider aussi les faits qui n’ont qu’un intérêt indirect, il m’aurait fallu diminuer la place et le temps que je pouvais consacrer aux faits indispensables. Il n’est pas, en histoire, de livre qui se suffise à lui-même, qui suffise au lecteur. Le mien, comme les autres, suppose et exige d’autres lectures.

Voilà comment j’ai choisi les faits. Voici dans quel ordre je les ai exposés.

L’ordre chronologique s’imposait, et j’ai pu le suivre strictement