Page:Aulnoy - Contes des Fées (éd. Corbet), 1825.djvu/112

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
102
L’OISEAU

cil : « Qui es-tu, lui dit-elle, pour oser t’approcher de mon excellente figure, et si près de mon trône d’or ? — Je me nomme Mie-Souillon, répondit-elle ; je viens de loin pour vous vendre des raretés. » Elle fouilla aussitôt dans son sac de toile, elle en tira les bracelets d’émeraudes que le roi Charmant lui avait donnés. « Ho, ho dit Truitonne, voilà de jolies verreries, en veux tu une pièce de cinq sous ? — Montrez-les, ma dame, aux connaisseurs, dit la reine, et puis nous ferons notre marché. » Truitonne qui aimait le roi le plus tendrement qu’une telle bête n’en était capable, étant ravie de trouver des occasions de lui parler, s’avança jusqu’à son trône, et lui montra les bracelets, le priant de lui en dire son sentiment. À la vue de ces bracelets, il se souvint de ceux qu’il avait donnés à Florine ; il pâlit, il soupira, et fut long-temps sans répondre ; enfin, craignant qu’on ne s’aperçût de l’état où ses différentes pensées le réduisaient, il se fit un effort et lui répliqua : « Ces bracelets valent, je crois, autant que mon royaume ; je pensais qu’il n’y en avait qu’une paire au monde, mais en voilà de semblables. »

Truitonne se plaça sur son trône, où elle avait moins bonne mine qu’une huître à l’écaille ; elle demanda à la reine combien, sans surfaire, elle voulait de ces bracelets ? « Vous auriez trop de peine à me les payer, madame, dit-elle, il vaut mieux vous proposer un autre marché : si vous me voulez procurer de coucher une nuit dans le cabinet des échos qui est au palais du roi, je