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LE PRINCE

dommage que vous ne soyez pas tous les jours aussi aimable, je vous aimerais beaucoup. — Ah ! s’il ne faut que causer pour vous plaire, répliqua Lutin, je ne cesserai pas un moment de parler. Mais, continua la princesse, ne jureriez-vous pas que ce perroquet est sorcier ? — Il est bien plus amoureux que sorcier, dit-il. » Dans ce moment Abricotine entra, et vint se jeter aux pieds de sa belle maîtresse ; elle lui apprit son aventure, et lui fit le portrait du prince avec des couleurs fort vives et fort avantageuses.

« J’aurais haï tous les hommes, ajouta-t-elle si je n’avais pas vu celui-là. Ah ! madame, qu’il est charmant ! son air et toutes ses manières ont quelque chose de noble et spirituel ; et comme tout ce qu’il dit plaît infiniment, je crois que j’ai bien fait de ne le pas amener. » La princesse ne répliqua rien là-dessus, mais elle continua de questionner Abricotine sur le prince ; si elle ne savait point son nom, son pays, sa naissance d’où il venait, où il allait ? et ensuite elle tomba dans une profonde rêverie.

Lutin examinait tout, et continuant de parler comme il avait commencé : « Abricotine est une ingrate, madame, dit-il, ce pauvre étranger mourra de chagrin s’il ne vous voit pas. — Hé bien, perroquet, qu’il en meure, répondit la princesse en soupirant ; et puisque tu te mêles de raisonner en personne d’esprit, et non pas en petit oiseau, je te défends de me parler jamais de cet inconnu. »

Léandre était ravi de voir que le récit d’Abri-