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PRINTANIÈRE.

Comme la cinquième ouvrait la bouche pour parler, l’on entendit dans la cheminée un bruit, comme d’une grosse pierre qui tomberait du haut d’un clocher, et Carabosse parut toute barbouillée de suie, criant à tue-tête : « Je doue cette petite créature,

De guignon guignonant
Jusqu’à l’âge de vingt ans.

À ces mots, la reine qui était dans son lit, se mit à pleurer et à prier Carabosse d’avoir pitié de la petite princesse. Toutes les fées lui disaient : « Hélas ! ma sœur, déguignonnez-la ; que vous a-t-elle fait ? » Mais cette laide fée ne répondait point ; de sorte que la cinquième, qui n’avait pas parlé, tâcha de racommoder l’affaire, et la doua d’une longue vie pleine de bonheur, après que le temps de la malédiction serait passé. Carabosse n’en fit que rire, et elle se mit à chanter vingt chansons ironiques, en regrimpant par le même chemin. Toutes les fées en demeurèrent dans une grande consternation, mais particulièrement la pauvre reine. Elle ne laissa pas de leur donner ce qu’elle avait promis ; elle y ajouta même des rubans, qu’elles aiment beaucoup. On leur fit grande chère ; et la plus vieille dit en partant, qu’elle était d’avis qu’on mît la princesse, jusqu’à l’âge de vingt ans, en quelque lieu où elle ne vît personne que les femmes qu’on lui donnerait, et qu’elle fût bien enfermée.

Là-dessus, le roi fit bâtir une tour couverte, où il n’y avait point de fenêtre : l’on n’y voyait