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LA PRINCESSE

de sa vie ; et s’enfonçant dans le plus épais du bois, elle tomba de faiblesse au pied d’un ormeau, sur lequel était perché un rossignol qui chantait à merveille. Il disait ces paroles en battant des ailes, comme s’il ne les eût chantées que pour Printanière : il les avait apprises exprès d’Ovide.

L’Amour est un méchant ; jamais le petit traître
Ne nous fait de faveurs, qu’il ne les fasse en maître ;
Et que, sous les appâts de ses fausses douceurs,
Ses traits envenimés n’empoisonnent les cœurs.

« Qui le peut mieux savoir que moi ? s’écria-t-elle en l’interrompant. Hélas ! je ne connais que trop toute la cruauté de ses traits et celle de mon sort. — Prends courage, lui dit l’amoureux rossignol, et cherche dans ce buisson, tu y trouveras des dragées et des tartelettes de chez le Coq ; mais ne sois plus assez imprudente pour en donner à Fanfarinet, » La princesse n’avait pas besoin de cette défense pour s’en garder ; elle n’avait pas encore oublié les deux derniers tours qu’il lui avait faits, et puis elle avait si grand besoin de manger, qu’elle croqua toute seule les amandes et les tartelettes. Le goulu Fanfarinet l’ayant aperçue manger sans lui, entra dans une si grande colère, qu’il accourut les yeux étincelans de rage, et l’épée à la main pour la tuer. Elle découvrit promptement la pierre du couvre-chef, qui rendait invisible ; et s’éloignant de lui elle lui reprocha son ingratitude dans des termes qui faisaient assez connaître qu’elle ne pouvait encore le haïr.

Cependant l’amiral Chapeau-Pointu avait dé-