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PRINTANIÈRE.

rent passés, et qu’elle pensa à l’état où elle était, elle demeura presque aussi morte que celui qu’elle venait de tuer. « Que deviendrai-je ? s’écriait-elle en pleurant ; je suis seule dans cette île, les bêtes sauvages me vont dévorer, ou je mourrai de faim : elle regrettait presque de ne s’être pas laissée manger par Fanfarinet. Elle s’assit toute tremblante, attendant le jour, qu’elle souhaitait bien fort ; car elle craignait les esprits, et surtout le cauchemar.

Comme elle était appuyée contre un arbre, et qu’elle regardait en l’air, elle aperçut d’un côté un beau chariot d’or, tiré par six grosses poules huppées : un coq servait de cocher, et un poulet gras de postillon. Il y avait dans le chariot une dame si belle, si belle, qu’elle ressemblait au soleil : son habit était tout brodé de paillettes d’or et de barres d’argent. Elle vit un autre chariot attelé de six chauve-souris ; un corbeau servait de cocher, et un escarbot de postillon. Il y avait dedans une petite magotine affreuse, dont l’habit était de peau de serpent, et sur sa tête un gros crapaud qui servait de fontange.

Jamais au grand jamais l’on n’a été si étonné que le fut la jeune princesse. Comme elle considérait ces merveilles, elle vit tout d’un coup les chariots s’avancer l’un vers l’autre ; et la belle dame tenant une lance dorée, et la laide une pique rouillée, elles commencèrent un rude combat, qui dura plus d’un quart d’heure. Enfin la belle fut victorieuse, la laide s’enfuit