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LA PRINCESSE

dame, ne dirai-je point à la reine ma mère qui m’a fait tant de bien ? — Belle princesse, répliqua-t-elle, embrassez-la pour moi, et lui dites que je suis la cinquième fée qui vous doua à votre naissance. »

La princesse étant dans le vaisseau, l’on tira plus de cent coups de canon, et plus de mille fusées. Elle arriva très-heureusement au port ; et trouva le roi et la reine qui l’attendaient avec tant de bonté, qu’ils ne lui laissèrent pas le temps de leur demander pardon de ses extravagances passées, quoiqu’elle se fût jetée à leurs pieds dès qu’elle les avait vus ; mais la tendresse paternelle l’avait prévenue, et l’on mit tout sur la vieille Carabosse.

Dans le même temps, le fils du grand roi Merlin arriva, inquiet de ne recevoir aucunes nouvelles de son ambassadeur. Il avait mille chevaux, et trente laquais bien habillés de rouge, avec de riches galons d’or : il était cent fois plus aimable que l’ingrat Fanfarinet. L’on n’eut garde de lui conter l’aventure de l’enlèvement, cela lui aurait peut-être donné quelques soupçons : on lui dit d’un air fort sincère, que son ambassadeur ayant soif, et voulant tirer de l’eau pour boire, était tombé dans le puits, et s’y était noyé. Il le crut sans peine, et l’on fit la noce, où la joie fut si grande, qu’elle effaça tous les chagrins passés.

À quelque chose qu’amour nous puisse assujétir,
Des règles du devoir on ne doit point sortir ;
Et malgré le penchant qui souvent nous entraîne ;
Je veux que la raison soit toujours souveraine ;
Que toujours maîtresse du cœur,
Elle règle à son gré nos vœux et notre ardeur.