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ROSETTE.

Il répliqua : « Oui, oui. » Et quand il eut dit cela, elle se mit au bout du bateau, assise auprès de lui, et lui dit : « Si tu veux, tu seras riche à jamais. » Il répondit : « Je le veux bien. » Elle continua, si tu veux, tu gagneras de bonnes pistoles. Il répondit : « Je ne demande pas mieux. — Eh bien, dit-elle, il faut que cette nuit, pendant que la princesse dormira, tu m’aides à la jeter dans la mer. Après qu’elle sera noyée, j’habillerai ma fille de ses beaux habits, et nous la mènerons au roi des Paons, qui sera bien aise de l’épouser ; et pour ta récompense, nous te donnerons ton plein cou chargé de diamans. »

Le batelier fut bien étonné de ce que lui proposait la nourrice. Il lui dit que c’était dommage de noyer une si belle princesse, qu’elle lui faisait pitié ; mais elle prit une bouteille de vin, et le fit tant boire, qu’il ne savait plus la refuser.

La nuit étant venue, la princesse se coucha comme elle avait accoutumé ; son petit Fretillon était joliment couché au fond du lit, sans remuer ni pieds ni pattes. Rosette dormait de toute sa force, quand la méchante nourrice qui ne dormait pas, s’en alla querir le batelier. Elle le fit entrer dans la chambre de la princesse ; puis sans la réveiller, ils la prirent avec son lit de plume, son matelas, ses draps, ses couvertures : la sœur de lait aidait de toute sa force. Ils jetèrent tout cela dans la mer ; et la princesse dormait de si bon sommeil, qu’elle ne se réveilla point.

Mais ce qu’il y eut d’heureux, c’est que son lit