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SERPENTIN

dit Polichinel, voici la reine des pagodes que j’ose vous présenter. — Je la connais il y a longtemps, dit Magotine ; elle est la cause que je reçus un affront le jour de sa naissance ; je ne l’oublierai jamais. — Hélas ! madame, lui dit la reine, je croyais que vous vous en étiez suffisamment vengée ; le don de laideur que vous me distribuâtes au suprême degré, pourrait avoir satisfait une personne moins vindicative que vous : — Comme elle cause ! dit la fée ; voici un docteur de nouvelle édition. Votre premier emploi sera d’enseigner la philosophie à mes fourmis : préparez —vous à leur donner tous les jours une leçon. — Comment m’y prendrai-je, madame, répliqua la reine affligée, je ne sais point la philosophie, et quand je la saurais, vos fourmis sont-elles capables de l’apprendre ? — Voyez, voyez cette raisonneuse, s’écria Magotine ; hé bien ! reine, vous ne leur apprendrez pas la philosophie, mais vous donnerez à tout le monde malgré vous, des exemples de patience qu’il sera difficile d’imiter. »

Là-dessus elle lui fit apporter des souliers de fer si étroits, que la moitié de son pied n’y pouvait entrer ; mais cependant il fallut bien les chausser : cette pauvre reine eut tout le temps de pleurer et de souffrir. « Oh ça, dit Magotine, voici une quenouille chargée de toile d’araignée, je prétends que vous la filiez aussi fine que vos cheveux, et je ne vous donne que deux heures. — Je n’ai jamais filé, madame, lui dit la reine ; mais encore que ce que vous voulez me paraisse