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LA BICHE

ma mignonne, je ne souffrirai pas qu’on te fasse un affront ; les cieux et tous les élémens s’intéressent dans cette affaire ; retourne chez toi, et te repose sur ta chère marraine. » La princesse Noire la remercia ; elle lui fit des présens de fleurs et de fruits, qu’elle reçut fort agréablement.

L’ambassadeur Becafigue s’avançait en toute diligence vers la ville capitale ou le père de Désirée faisait son séjour ; il se jeta aux pieds du roi et de la reine : il versa beaucoup de larmes, et leur dit dans les termes les plus touchans, que le prince Guerrier mourrait, s’ils lui retardaient plus long-temps le plaisir de voir la princesse leur fille ; qu’il ne s’en fallait plus que trois mois qu’elle n’eût quinze ans ; qu’il ne lui pouvait rien arriver de fâcheux dans un espace si court ; qu’il prenait la liberté de les avertir qu’une si grande crédulité pour de petites fées faisait tort à la majesté royale ; enfin il harangua si bien, qu’il eut le don de persuader. L’on pleura avec lui, se représentant le triste état où le jeune prince était réduit, et puis on lui dit qu’il fallait quelques jours pour se déterminer et lui répondre. Il répartit qu’il ne pouvait donner que quelques heures ; que son maître était à l’extrémité ; qu’il s’imaginait que la princesse le haïssait, et que c’était elle qui retardait son voyage : on l’assura donc que le soir il saurait ce qu’on pouvait faire.

La reine courut au palais de sa chère fille : elle lui conta tout ce qui se passait. Désirée