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AU BOIS.

cha de Longue-Epine. Ô dieux ! que devint-il, après avoir considéré cette fille, dont la taille extraordinaire faisait peur ! Elle était si grande, que les habits de la princesse lui couvraient à peine les genoux ; sa maigreur affreuse, son nez plus crochu que celui d’un perroquet, brillait d’un rouge luisant ; il n’a jamais été de dents plus noires et plus mal rangées ; enfin, elle était aussi laide que Désirée était belle.

Le prince, qui n’était occupé que de la charmante idée de sa princesse, demeura transi et comme immobile à la vue de celle-ci ; il n’avait pas la force de proférer une parole ; il la regardait avec étonnement, et s’adressant ensuite au roi : « Je suis trahi, lui dit-il, ce merveilleux portrait sur lequel j’engageai ma liberté, n’a rien de la personne qu’on nous envoie ; l’on a cherché à nous tromper, l’on y a réussi ; il m’en coûtera la vie. — Comment l’entendez-vous, seigneur, dit Longue-Epine, l’on a cherché à vous tromper ? Sachez que vous ne le serez jamais en m’épousant. » Son effronterie et sa fierté n’avaient pas d’exemples. La dame d’honneur renchérissait encore par-dessus. « Ha ! ma belle princesse, s’écriait-elle, où sommes-nous venues ? est-ce ainsi que l’on reçoit une personne de votre rang ? quelle inconstance ! quel procédé ! le roi votre père en saura bien tirer raison. — C’est nous qui nous la ferons faire, répliqua le roi ; il nous avait promis une belle princesse, il nous envoie un squelette, une momie qui fait peur : je ne n’étonne plus qu’il ait gardé ce beau trésor