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L’OISEAU

ble roi : l’idée que j’en conserve, ne peut servir qu’à augmenter mes peines. Je ne dois pas douter que c’est pour m’empêcher de le voir davantage, que la reine me traite si cruellement. Hélas ! que le peu de beauté dont le ciel m’a pourvue, coûtera cher à mon repos ! » Elle pleurait ensuite si amèrement que sa propre ennemie en aurait eu pitié, si elle avait été témoin de ses douleurs.

C’est ainsi que la nuit se passa. La reine qui voulait engager le roi Charmant par tous les témoignages qu’elle pourrait lui donner de son attention, lui envoya des habits d’une richesse et d’une magnificence sans pareille, faits à la mode du pays, et l’ordre des Chevaliers d’Amour qu’elle avait obligé le roi d’instituer le jour de leurs noces. C’était un cœur d’or émaillé, de couleur de feu, entouré de plusieurs flèches, et percé d’une, avec ces mots : une seule me blesse. La reine avait fait tailler pour Charmant un cœur d’un rubis gros comme un œuf d’autruche ; chaque flèche était d’un seul diamant, longue comme le doigt ; et la chaîne où ce cœur tenait, était faite de perles, dont la plus petite pesait une livre ; enfin depuis que le monde est monde, il n’avait rien paru de tel.

Le roi à cette vue demeura si surpris, qu’il fut quelque temps sans parler. On lui présenta en même temps un livre, dont les feuilles étaient de velin, avec des miniatures admirables ; la couverture d’or, chargée de pierreries, et les statuts de l’ordre des Chevaliers d’Amour y étaient écrits