Page:Aulnoy - Contes des Fées (éd. Corbet), 1825.djvu/87

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
77
BLEU.

me flattais de régner, toi qui m’avais rendu l’amour de mon père, que t’ai-je fait pour me plonger tout d’un coup dans les plus amères douleurs ? Est-ce dans un âge aussi tendre que le mien qu’on doit commencer à ressentir ton inconstance ? Reviens, barbare, reviens s’il est possible ; je te demande pour toutes faveurs de terminer ma fatale destinée. » L’Oiseau Bleu écoutait ; et plus il écoutait, plus il se persuadait que c’était son aimable princesse qui se plaignait ; il lui dit : « Adorable Florine, merveille de nos jours, pourquoi voulez-vous finir si promptement les vôtres ? Vos maux ne sont point sans remède. — Eh ! qui me parle, s’écria-t-elle, d’une manière si consolante ? — Un roi malheureux, reprit l’Oiseau, qui vous aime et n’aimera jamais que vous. — Un roi qui m’aime ! ajouta-t-elle ; est-ce ici un piège que me tend mon ennemie ? Mais au fond, qu’y gagnera-t-elle ? Si elle cherche à découvrir mes sentimens, je suis prête à lui en faire l’aveu. — Non, ma princesse, répondit-il, l’amant qui vous parle n’est point capable de vous trahir. » En achevant ces mots, il vola sur la fenêtre. Florine eut d’abord grand’peur d’un oiseau si extraordinaire, qui parlait avec autant d’esprit que s’il avait été homme, quoiqu’il conservât le petit son de voix d’un rossignol ; mais la beauté de son plumage et ce qu’il lui dit la rassura. « M’est-il permis de vous revoir, ma princesse, s’écria-t-il ? Puis-je goûter un bonheur si parfait sans mourir de joie ? Mais hélas ! que cette joie est