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FINETTE CENDRON

avaient fait ; elle prit son sac dans le dessein de s’habiller, mais elle demeura bien affligée de ne trouver que des cailloux ; elle aperçut en même temps ses sœurs qui s’étaient accommodées comme des soleils. Elle pleura et se plaignit de la trahison qu’elles lui avaient faite, et elles d’en rire et de se moquer. Est-il possible, leur dit-elle, que vous ayez le courage de me mener au château sans me parer et me faire belle ? — Nous n’en avons pas trop pour nous, répliqua Fleur-d’Amour ; tu n’auras que des coups si tu nous importunes. — Mais, continua-t-elle, ces habits que vous portez sont à moi ; ma marraine me les a donnés, ils ne vous doivent rien. — Si tu parles davantage, dirent-elles, nous allons t’assommer, et nous t’enterrerons sans que personne le sache. La pauvre Finette n’eut garde de les agacer ; elle les suivait doucement et marchait un peu derrière, ne pouvant passer que pour leur servante.

Plus elles approchaient de la maison, plus elle leur semblait merveilleuse. Ah ! disaient Fleur-d’Amour et Belle-de-Nuit, que nous allons nous bien divertir ; que nous ferons bonne chère ! nous mangerons à la table du roi ; mais pour Finette elle lavera les écuelles dans la cuisine, car elle est faite comme une souillon, et si l’on demande qui elle est, gardons-nous bien de l’appeler notre sœur : il faudra dire que c’est la petite vachère du village. Finette qui était pleine d’esprit et de beauté, se désespérait d’être si maltraitée. Quand elles furent à la porte du château, elles frappèrent : aussitôt une vieille femme épouvantable leur vint ouvrir, elle n’avait qu’un œil au milieu du front, mais il était plus grand que cinq ou six autres, le