Page:Aulnoy - Les contes choisis, 1847.djvu/193

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
159
L’OISEAU BLEU.

temps dans sa chaise volante, sans épouser la princesse qu’il aimait, il lui demanda où elle voulait que les noces se fissent. Elle lui dit qu’elle avait pour marraine une fée qu’on nommait Soussio, qui était fort célèbre ; qu’elle était d’avis d’aller à son château. Quoique le roi ne sût pas le chemin, il n’eut qu’à dire à ses grosses grenouilles de l’y conduire ; elles connaissaient la carte générale de l’univers, et en peu de temps elles rendirent le roi et Truitonne chez Soussio.

Le château était si bien éclairé, qu’en arrivant le roi aurait connu son erreur, si la princesse ne s’était soigneusement couverte de son voile. Elle demanda sa marraine ; elle lui parla en particulier, et lui conta comme quoi elle avait attrapé Charmant, et qu’elle la priait de l’apaiser. Ah ! ma fille, dit la fée, la chose ne sera pas facile ; il aime trop Florine, je suis certaine qu’il va nous faire désespérer. Cependant le roi les attendait dans une salle, dont les murs étaient de diamants si clairs et si nets, qu’il vit au travers Soussio et Truitonne causer ensemble. Il croyait rêver. Quoi ! disait-il, ai-je été trahi ? les démons ont-ils apporté cette ennemie de notre repos ? Vient-elle pour troubler mon mariage ? Ma chère Florine ne paraît point ! son père l’a peut-être suivie. Il pensait mille chose ; qui commençaient à le désoler. Mais ce fut bien pis quand elles entrèrent dans la salle, et que Soussio lui dit d’un ton absolu Roi Charmant, voici la princesse Truitonne à laquelle vous avez donné votre foi ; elle est ma filleule, et je souhaite que vous l’épousiez tout-à-l’heure. Moi, s’écria-t-il, moi, j’épouserais ce petit monstre ! Vous me