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L’OISEAU BLEU.

En même temps le roi, change de figure ; ses bras se couvrent de plumes et forment des ailes ; ses jambes et ses pieds deviennent noirs et menus ; il lui croît des ongles crochus, son corps se rapetisse ; il est tout garni de longues plumes fines et mêlées de bleu céleste ; ses yeux s’arrondissent, et brillent comme des soleils ; son nez n’est plus qu’un bec d’ivoire : il s’élève sur sa tête une aigrette blanche qui forme une couronne, il chante à ravir et parle de même. En cet état il jette un cri douloureux de se voir ainsi métamorphosé, et s’envole à tire d’aile, pour fuir le funeste palais de Soussio.

Dans la mélancolie qui l’accable, il voltige de branche en branche, et ne choisit que les arbres consacrés à l’amour ou à la tristesse, tantôt sur les myrtes, tantôt sur les cyprès ; il chante des airs pitoyables, où il déplore sa méchante fortune et celle de Florine. En quel lieu ses ennemis l’ont-ils cachée ? disait-il. Qu’est devenue cette belle victime ? La barbarie de la reine la laisse-t-elle encore respirer ?. Où la chercherai-je ? Suis-je condamné à passer sept ans sans elle ? Peut-être que pendant ce temps on la mariera, et que je perdrai pour jamais l’espérance qui soutient ma vie. Ces différentes pensées affligeaient l’Oiseau Bleu à tel point, qu’il voulait se laisser mourir.

D’un autre côté, la fée Soussio renvoya Truitonne à la reine, qui était bien inquiète comment les noces se seraient passées. Mais quand elle vit sa fille, et qu’elle lui raconta tout ce qui venait d’arriver, elle se mit dans une colère terrible, dont le contre-coup retomba sur la pauvre Florine. Il faut, dit-elle, qu’elle se repente plus d’une fois