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L’OISEAU BLEU.

d’avoir su plaire à Charmant. Elle monta dans la tour avec Truitonne, qu’elle avait parée de ses plus riches habits elle portait une couronne de diamants sur sa tête, et trois filles des plus riches barons de l’État tenaient la queue de son manteau royal ; elle avait au pouce l’anneau du roi Charmant, que Florine remarqua le jour qu’ils parlèrent ensemble : elle fut étrangement surprise de voir Truitonne dans un si pompeux appareil. Voilà ma fille qui vient vous apporter des présents de sa noce, dit la reine ; le roi Charmant l’a épousée ; il l’aime à la folie ; il n’a jamais été des gens plus satisfaits. Aussitôt on étale devant la princesse des étoffes d’or et d’argent, des pierreries, des dentelles, des rubans, qui étaient dans de grandes corbeilles de filigranes d’or. En lui présentant toutes ces. choses, Truitonne ne manquait pas de faire briller l’anneau du roi ; de sorte que la princesse Florine ne pouvant plus douter de son malheur, elle s’écria, d’un air désespéré, qu’on ôtât de ses yeux tous ces présents si funestes ; qu’elle ne voulait plus porter que du noir, ou plutôt qu’elle voulait présentement mourir. Elle s’évanouit, et la cruelle reine, ravie d’avoir si bien réussi, ne permit pas qu’on la secourût elle la laissa seule dans le plus déplorable état du monde, et fut conter malicieusement au roi, que sa fille était si transportée de tendresse, que rien n’égalait les extravagances qu’elle faisait ; qu’il fallait bien se donner de garde de la laisser sortir de la tour. Le roi lui dit qu’elle pouvait gouverner cette affaire à sa fantaisie, et qu’il en serait toujours satisfait.

Lorsque la princesse revint de son évanouissement, et