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LE RAMEAU D’OR

bitent ! Est-il possible, continua-t-il, que vous nous vouliez tant de mal ? Tout du moins exceptez-moi, puisque je suis le premier qui vous ai offert ses services. — Non, reprit Brillante, je ne veux point vous voir plus souvent que les autres, quoique je sente déjà une estime particulière pour vous ; mais enseignez-moi quelque sage bergère, chez qui je puisse me retirer ; car étant inconnue ici, et dans un âge à ne pouvoir demeurer seule, je serai bien aise de me mettre sous sa conduite. Sans-Pair fut ravi de cette commission. Il la mena dans une cabane si propre, qu’elle avait mille agréments dans sa simplicité. Il y avait une petite vieillotte qui sortait rarement, parce qu’elle ne pouvait presque plus marcher : Tenez, ma bonne mère, dit Sans-Pair en lui présentant Brillante, voici une fille incomparable, dont la seule présence vous rajeunira. La vieille l’embrassa, et lui dit d’un air affable qu’elle était la bien-venue ; qu’elle avait de la peine de la loger si mal, mais que tout au moins elle la logerait fort bien dans son cœur. — Je ne pensais pas, dit Brillante, trouver ici un accueil si favorable, et tant de politesse ; je vous assure, ma bonne mère, que je suis ravie d’être auprès de vous. Ne me refusez pas, continua-t-elle, en s’adressant au berger, de me dire votre nom, pour que je sache à qui je suis obligée d’un tel service. — On m’appelle Sans-Pair. La princesse lui dit qu’on la nommait Brillante. La vieille parut charmée d’un si aimable nom.

La vieille bergère ayant peur que Brillante n’eût faim, lui présenta dans une terrine fort propre, du lait doux, avec du pain bis, des œufs frais, du beurre nouveau battu,