phosés en chats et en souris. Ce qui est plaisant, c’est qu’ils se haïssent autant qu’ils se sont aimés, et que l’on ne peut trouver une vengeance plus complète. — Ah ! seigneur, s’écria Brillante, rendez-moi souris ; je ne le mérite pas moins que ces pauvres princesses. — Comment, dit le magicien, petite bergeronnette, tu ne veux donc pas m’aimer ? — J’ai résolu de n’aimer jamais, dit-elle. — Ô ! que tu es simple ! continua-t-il, je te nourrirai à merveille, je te ferai des contes, je te donnerai les plus beaux habits du monde, tu n’iras qu’en carrosse et en litière, tu t’appelleras madame. — J’ai résolu de n’aimer jamais, répondit encore la princesse. — Prends garde à ce que tu dis, s’écria l’enchanteur en colère ; tu t’en repentiras pour longtemps. — N’importe, dit Brillante, j’ai résolu de n’aimer jamais. — Ho bien, trop indifférente créature, dit-il en la touchant, puisque tu ne veux pas aimer, tu dois être d’une espèce particulière : tu ne seras donc à l’avenir ni chair, ni poisson, tu n’auras ni sang ni os, tu seras verte, parce que tu es encore dans ta verte jeunesse ; tu seras légère et fringante, tu vivras dans les prairies, comme tu vivais ; on t’appellera sauterelle. Au même moment, la princesse Brillante devint la plus jolie sauterelle du monde ; et jouissant de la liberté, elle se rendit promptement dans le jardin.
Quand Sans-Pair revint à lui, il se rendit chez la vieille bergère où Brillante se retirait, il apprit qu’elle n’avait point paru depuis la veille ! Il pensa mourir d’inquiétude. Il s’éloigna, accablé de mille pensées différentes ; il s’assit tristement au bord de la rivière : il fut près cent fois de