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AULU-GELLE


le consulat dans des circonstances très- difficiles pour la république, et n'ayant pour compétiteur que des hommes sans énergie et sans capacité, Fabricius employa tout son crédit pour que les suffrages se portassent sur ce Rufinus. Comme on s'étonnait généralement que Fabricius secondât un homme d'une avarice sordide, et qu'il détestait ouvertement : « Qu'on ne s'étonne pas, dit-il, si j'aime mieux être pillé que vendu. » Dans la suite, Fabricius, devenu censeur, chassa du sénat ce même Rufinus, quoiqu'il eût été deux fois consul et dictateur, comme coupable de déployer un trop grand luxe, et d'avoir dix livres de vaisselle d'argent. Ce mot de Fabricius, que je viens de rapporter, se trouve dans la plupart des historiens ; mais Cicéron rapporte, dans le deuxième livre de l'Orateur, que Fabricius l'adressa à Rufinus lui-même, qui venait le remercier de son concours, pour lui faire entendre que les remerciments étaient inutiles. Voici les paroles mêmes de Cicéron : « Un genre assez heureux de plaisanterie, c'est de profiter d'une circonstance peu importante ou même d'un seul mot, pour laisser voir sa pensée. P. Cornélius, à qui l'on reprochait son avarice et ses déprédations, passait en même temps pour un général brave et habile. Comme il remerciait C. Fabricius de lui avoir, malgré son inimitié, donné sa voix pour le consulat, dans un temps où Rome soutenait une guerre