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VOYAGE D’UNE FEMME

inculte et d’un climat meurtrier. La plupart de ces masures ont des pieds comme les maisons de Tromsoë, et se soutiennent sur quatre gros troncs de sapin. Elles sont couvertes de gazon qui forme les seules plaques de verdure du paysage. Il est fort singulier de voir chaque matin les femmes monter leurs chèvres sur le toit à l’aide d’une échelle, afin que les pauvres bêtes puissent brouter un peu de nourriture fraîche. Le dessous des maisons abrite, comme le ferait une remise, les filets pour la pêche, le bois, les traîneaux, les outils et tous les menus ustensiles qui gêneraient dans l’intérieur. Chose remarquable, tous ces objets sont ainsi sur la voie publique, à la portée de tout le monde, et il ne se commet jamais de vol.

Les habitants du Finmark allient la plus grande probité à un extrême amour du lucre ; ils rançonnent sans pitié les rares étrangers qu’ils aperçoivent chaque année, mettent toutes les choses usuelles à des prix exagérés, et ne détourneraient pas un bout de fil. Ils vendent leurs denrées trois fois ce qu’elles valent ; mais on loge chez eux sans la garantie d’une serrure, et on n’est jamais volé. La difficulté des communications, l’impossibilité où serait le coupable de se défaire d’un objet dérobé, viennent bien en aide à leur bonne nature ; mais enfin, tel qu’il est, le fait vaut la peine d’être constaté.

Le port n’est pas entouré de quais ; seulement, pour la commodité des embarquements, on a construit une plate-forme en bois, sorte de balcon circulaire qui court le long de tous les hangars. Quand un navire veut décharger une cargaison, il suffit de