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LETTRE VI

LE SPITZBERG


Mes départs sont d’ordinaire marqués par des accidents dus sans doute aux petites conspirations occultes des génies qui s’opposent à mon humeur voyageuse : en traversant Paris, c’était un cheval mal attelé qui pensa nous faire verser dès le début ; au Havre, un coup de mer si violent que nous avons brisé plusieurs palettes de nos roues ; à Amsterdam, un banc de sable où on s’engrava ; à Drontheim, une brume qui obligea à jeter l’ancre presque dans la rade. En quittant le port d’Hammerfest, un virement de bord opéré trop près de terre faillit briser notre beaupré, et, à peine en mer, les vagues ayant fait de fortes avaries à la chaloupe du pilote, celui-ci prétendait nous faire rentrer au port afin de réparer sa barque ; mais tout s’arrangea : le charpentier vint en aide au pauvre pilote, et il put, après nous avoir mis en plein océan Glacial, retourner le cœur content près de sa femme et de ses enfants.

Nous avions quitté Hammerfest le 17 juillet, et je ne saurais vous rendre compte de mes impressions des premiers jours : ce serait trop monotone, car je trouvai à propos d’être très-malade ; j’entendais dire autour de moi que le vent était plein sud et que nous marchions très-bien ; mais ce m’était une faible