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VOYAGE D’UNE FEMME

mieux et montai sur le pont. Je fus bien surprise de me trouver déjà en présence d’un pays si différent de la France ; nous passions alors devant une petite ville nommée, je crois, Helvoëtsluys, située au milieu d’un paysage frais, peigné, gracieux, coquet, un vrai paysage d’éventail : il n’y manquait rien, pas même les moutons blancs, ni la silhouette élancée de trois grandes filles en jupes courtes, qui étendaient du linge sur un pré d’un vert éclatant.

Les rives de la Meuse sont très-plates ; le fleuve est endigué au moyen de petits remparts bas, qui, aperçus de loin, comme je les voyais, ont l’air de murailles faites par des vanniers : l’œil n’aperçoit que de menues branches ou des joncs (je ne saurais dire lesquels) artistement entrelacés, et on s’étonne de voir une si grande force cachée dans un si élégant travail.

Nous avons laissé le Briel à droite, passé près de Dortrecht, dont j’ai seulement entrevu les hauts clochers couverts d’ardoises, et le soir même nous sommes arrivés à Rotterdam.

J’ai traversé Rotterdam à pied, et un peu à la hâte, pour aller trouver la diligence de la Haye ; j’ai cependant eu le temps d’être séduite par son exquise propreté, par ses canaux limpides bordés de beaux arbres, par ses jolis ponts de pierre légèrement jetés d’un bord à l’autre, par son air calme, riant, paisible et doux comme le bonheur. Presque toutes ses maisons sont précédées d’un perron de pierre, de bois ou de brique ; chaque propriétaire arrange le sien suivant son goût, ce qui introduit de charmants caprices dans l’architecture générale, à la grande confusion