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VOYAGE D’UNE FEMME AU SPITZBERG.

ticularités-ci : on dit des vers de circonstance qui se trouvèrent bons, et le cuisinier, pour faire prendre ses gelées, se contenta de les laisser pendant quelques moments exposées sur le pont.

Le 30, nous longeâmes une longue tranche de terre détachée de la grande côte, nommée l’île du Prince Charles. Enfin, le 31 juillet, nous entrâmes dans une petite baie profonde, désignée sur les cartes anglaises sous le nom de Magdalena-Bay (baie Madeleine).

Nous étions donc au but de notre long et aventureux voyage : au Spitzberg !

Le Spitzberg est une île plus au nord que le pays des Samoyèdes, que la Sibérie et que la Nouvelle-Zemble ; c’est une île bien véritablement placée aux confins du monde ; c’est un lieu étrange et peu connu en vérité : car, lorsque j’étais en Danemark et en Suède, plusieurs personnes, ayant entendu dire que j’allais au Spitzberg, me demandèrent si je comptais réellement monter jusqu’au sommet du Spitzberg. Le mot Spitzberg, qui signifie montagne pointue, les avait induites en erreur, et elles imitaient en cette circonstance le singe de La Fontaine, prenant le nom d’un port pour un nom d’homme.

Si peu connu qu’il soit, le Spitzberg a un maître ; il appartient à l’empereur de Russie, qui n’a pas encore imaginé d’en faire une succursale de la Sibérie. Ce serait du reste clémence ; là on serait sûr de mourir dès le premier hiver. En novembre, le mercure gèle, on casse l’eau-de-vie à coups de hache, et on peut constater de 45 à 50° de froid.

L’île du Spitzberg est située entre le 77° et le 81° de