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VOYAGE D’UNE FEMME

à moi et me rendait la traversée de cette marécageuse Laponie aussi humide que possible. L’Alten, si beau et si paisible à notre arrivée, débordait de toutes parts ; il eut été imprudent de le faire passer à des chevaux lourdement chargés. Nous résolûmes d’envoyer les chevaux avec les guides à un endroit nommé Kalanitoe, situé à sept lieues de Kautokeino, et de nous rendre jusque-là en bateau. Les secousses du cheval me faisant beaucoup souffrir, je fus très-satisfaite de pouvoir les éviter encore pendant quelques heures. Je m’étendis dans un léger bateau de peau de phoque, et, supportant avec résignation la pluie qui m’inondait malgré mes de manteaux, je regardai les rives du fleuve.

L’Alten, en lapon Sapriokki, est très-sinueux, et ses bords présentent les aspects les plus variés dans le petit espace qui sépare Kautokeino de Kalanitoe : tantôt il court large et impétueux comme un torrent, se précipitant avec fracas sur des îlots de pierres ; tantôt il glisse paisible et limpide entre deux berges vertes, comme la rivière factice d’un parc anglais. Dans ses moments violents, l’Alten est coupé de rapides et sa navigation devient dangereuse. Les Lapons, aidés seulement de longues perches, sont d’une surprenante habileté pour faire franchir ces rapides à leurs bateaux ; ils prennent leur point d’appui avec une précision parfaite et font faire au bateau, en toute sûreté, les sauts périlleux les plus inquiétants avec d’autres pilotes. Près de Kalanitoe, en sortant d’une espèce de lac immense formé par l’Alten, nous nous trouvâmes entraînés vers une cascade haute d’une trentaine de pieds, qui nous faisait en-