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VOYAGE D’UNE FEMME

peintres ; le bien-être du peuple a sans doute gagné à recevoir les ballots de lainages allemands et les cotonnades de l’Angleterre, mais le pittoresque s’est évanoui. Adieu les manteaux de peaux de bêtes, les habits étrangement coupés, les bijoux baroques, les armes bizarres ! toutes ces choses charmantes à rencontrer pour le voyageur ont disparu : il faut aller les chercher maintenant jusque chez les Lapons, et c’est bien rude ! Les femmes finlandaises portent de longues robes de laine à tailles courtes, dont les manches s’arrêtent au-dessus du coude pour laisser passer une manche de toile blanche ; elles nouent sur leur tête la fanchon suédoise en cotonnade rouge ou bleue ; les hommes ont des vestes rondes en wadmel gris, des pantalons larges et des casquettes de cuir à longues visières. Hommes et femmes se chaussent de bottes laponnes, faites de peau de jarrets de rennes, et, sans cet indice, ressembleraient tout autant à des Picards qu’à des Finlandais. Dans les grandes fêtes, m’a-t-on dit, et particulièrement à Noël et le jour de leur mariage, on voit sortir des coffres de magnifiques costumes : la fiancée porte une couronne dorée, ses cheveux flottent sur ses épaules, sa robe est brodée de mille couleurs ; sa poitrine brille de l’éclat des bijoux d’or et d’argent ; malheureusement pour moi, n’ayant pu assister à aucune de ces solennités, j’ai dû me contenter du récit de toutes ces magnificences. J’y crois néanmoins, sachant combien le paysan au travail diffère partout du paysan en fête ; qui devinerait dans notre Normandie la belle coiffure cauchoise sous le hideux bonnet de coton des femmes ! Ajoutez que j’ai seulement traversé les plus