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AU SPITZBERG.

La Suède méridionale offre d’admirables paysages. J’avais sans cesse sous les yeux un panorama dont les beautés variaient à chaque instant : les grandes forêts versaient leurs ombres sur d’agrestes vallées ; l’émeraude des lacs s’enchâssait dans tous les tons chauds des plaines couvertes de chaume ; quelque belle rivière allait rejoindre la mer entre deux rives de prairies, ou bien nous traversions Nykoping, Norkoping, villes grandes et gaies où les physionomies ont comme un reflet de la riante nature qui les entoure. Linkoping, commerçante et bien bâtie, est encore mieux située que les deux autres, étant placée sur le trajet que fait l’écoulement du lac Weter pour gagner la Baltique.

Une nuit, près de cette dernière ville, nous eûmes un spectacle merveilleux ; le ciel s’enflamma, et une aurore boréale rouge vint y promener ses lueurs mouvantes. Au début, nous n’avions vu que de longues spirales d’un rose pâle tourmentées et tordues comme des joncs entrelacés ; puis le rose devint pourpre et les joncs devinrent les cordes d’une harpe gigantesque dont une main mystérieuse semblait remuer les cordes silencieuses ; enfin les contours se déplacèrent, le mouvement se ralentit, et il ne resta à l’horizon qu’une sorte de roue immense et rouge qui disparut lentement derrière les collines en les colorant de lueurs, comme l’aurait fait un incendie lointain.

Cette aurore boréale, remarquez-le, était rouge, différant en cela de toutes celles que j’avais observées dans les contrées de l’extrême nord, où elles nous apparurent toujours d’un jaune pâle un peu verdâtre, couleur soufre.