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Page:Austen - Orgueil et préjugé, 1966.djvu/165

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pour aller se promener, soudain un bruit se fit entendre ; il semblait que toute la maison fût en confusion : après avoir écouté quelques instants, elle entendit quelqu’un monter l’escalier d’un pas précipité et l’appeler à haute voix ; ouvrant la porte, elle vit Maria qui, hors d’haleine et d’un air agité, lui cria :

« Oh ! ma chère Élisabeth, venez, venez, je vous en prie, car vous n’avez encore rien vu de semblable ; je ne vous dirai point ce que c’est, mais hâtez-vous de descendre. »

Toutes les questions d’Élisabeth furent vaines, Maria ne voulut lui rien dire de plus, et ensemble elles coururent à la salle à manger, dont les fenêtres donnaient sur la route, pour voir cette chose si merveilleuse : c’étaient deux dames en phaéton arrêtées à la grille.

« Quoi ! n’est-ce que cela ? s’écria Élisabeth ; je croyais que tous les cochons du village étaient pour le moins entrés dans le jardin, et ne voici que lady Catherine et sa fille !

— Oh, ma chère, dit Maria fort choquée d’une pareille méprise, ce n’est pas lady Catherine : la vieille dame est Mme Jenkinson, qui demeure avec elle, l’autre est Mlle de Brough. Mais regardez-la donc, elle n’est pas si grande que moi : qui aurait pu s’imaginer qu’elle fût si maigre et si petite !

— Elle est bien malhonnête de tenir Charlotte sur la route d’un temps si froid, que n’entre-t-elle ?

— Oh ! Charlotte dit qu’elle ne le fait presque jamais ; c’est une faveur toute particulière lorsque Mlle de Brough daigne entrer ici.

— J’aime son extérieur, dit Élisabeth, occupée d’une tout autre idée ; elle paraît malade, et a l’air chagrin… Oui ! elle lui conviendra à merveille ; voilà absolument la femme qu’il lui faut. »

M. Colins et Charlotte, tous deux debout à la grille, discouraient avec ces dames, et sir William, au grand divertissement d’Élisabeth, était posté près de la porte en contemplation de la noble dame, saluant fort respectueusement chaque fois qu’elle tournait les yeux de son côté.