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Page:Austen - Orgueil et préjugé, 1966.djvu/172

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avons eu toute espèce de maîtres ; celles qui voulaient être paresseuses, le pouvaient, il est vrai !

— Oh ! sans doute, et voilà ce qu’une institutrice sait empêcher. Si j’eusse connu madame votre mère, je lui aurais sérieusement conseillé d’en prendre une. Il est étonnant à combien de familles j’en ai procuré. Je suis toujours contente d’être utile à une jeune personne ; quatre nièces de Mme Jenkinson ont été par moi merveilleusement placées, et l’autre jour encore j’ai recommandé une jeune personne dont par hasard j’entendis parler. Vous ai-je dit, madame Colins, qu’hier lady Metcalfe m’est venue remercier, elle est enchantée de miss Pope. Lady Catherine, m’a-t-elle dit, vous m’avez donné un trésor ! Vos sœurs cadettes, mademoiselle Bennet, ne vont point encore dans le monde, je présume ?

— Pardonnez-moi, madame, elles y vont toutes.

— Toutes ! Comment, toutes cinq à la fois ? A-t-on jamais vu présenter les cadettes, avant même que leurs aînées soient mariées ; cela n’est pas raisonnable, votre dernière sœur doit être bien jeune ?

— Oui, elle n’a que quinze ans ; peut-être est-elle bien jeune pour voir le monde, mais en vérité, madame, je crois qu’il serait bien dur pour les sœurs cadettes, de ne pouvoir jouir de la société, parce que leurs aînées n’ont point eu l’occasion, ou la volonté de se marier de bonne heure. Les plus jeunes ont autant de droit que les autres aux plaisirs de la jeunesse, et être retenues par un tel motif ne serait pas, ce me semble, le moyen de leur inspirer les unes pour les autres une bien tendre amitié.

— Mais, mais, dit lady Catherine, pour une si jeune personne, vous donnez votre opinion avec beaucoup de décision ; quel âge avez-vous ?

— Avec trois sœurs cadettes en âge d’être mariées, répondit Élisabeth en souriant, pouvez-vous croire, madame, que je veuille l’avouer ? »

Ne point recevoir une réponse directe, parut chose nouvelle pour lady Catherine, et l’air étonné dont elle regarda Élisabeth, fit soupçonner à celle-ci que c’était la