Page:Austen - Orgueil et préjugé, 1966.djvu/315

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de circonstances, car avec un tel mari, son malheur était regardé comme certain.

Deux semaines s’étaient écoulées, depuis que Mme Bennet n’avait quitté son appartement, mais ce beau jour la vit reprendre, et sa place à table, et ses occupations habituelles. Aucun sentiment de honte ne venait troubler sa joie ; le mariage d’une de ses filles qui, depuis qu’Hélen était entrée dans sa seizième année avait été l’objet de tous ses désirs, allait enfin être accompli ; le trousseau, les bijoux, occupaient seuls sa pensée ; elle cherchait avec empressement une maison dans le voisinage qui pût convenir à sa fille, et sans considérer ou même savoir quel pourrait être leur revenu, en rejetait beaucoup comme n’étant ni assez grandes ni assez bien situées.

« Hay-Park pourrait convenir, dit-elle, si les Goulding voulaient le quitter, ou la grande maison à Stoke, si le salon était plus grand. Asworth est trop loin ; je serais malheureuse si je ne pouvais la voir tous les jours ; et quant à Purailodge, les attiques sont affreux. »

Pendant que les domestiques étaient présents, son mari la laissa parler sans l’interrompre, mais dès qu’ils se furent retirés : « Madame Bennet, lui dit-il, avant que vous n’arrêtiez une de ces maisons, ou toutes même, pour votre fille et votre gendre, entendons-nous, je vous prie, il en est une dans le voisinage où ils ne seront jamais admis : je ne veux point paraître approuver leur imprudence, en les recevant à Longbourn. »

Une vive dispute suivit cette déclaration, mais M. Bennet fut inébranlable, ce qui donna bientôt lieu à une autre scène encore plus animée, car Mme Bennet vit avec horreur et étonnement que son mari ne voulait pas lui faire la moindre avance pour acheter les habits de noces de sa fille. Elle ne pouvait concevoir que son ressentiment fût poussé au point de refuser à Lydia un avantage sans lequel son mariage lui paraissait à peine valable ; et elle était bien plus vivement humiliée de l’inconvenance qu’il y avait pour sa fille à se marier sans bijoux ni chiffons que du souvenir de