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Page:Austen - Orgueil et préjugé, 1966.djvu/346

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chapitre 54


Dès qu’ils furent partis, Élisabeth chercha, par une promenade, à remettre ses esprits, ou, pour mieux dire, voulut sans contrainte se livrer à des réflexions, qui ne pouvaient que les troubler davantage : la conduite de M. Darcy l’avait surprise et contrariée.

« Pourquoi venir ici, se disait-elle, s’il voulait être grave, silencieux et indifférent comme autrefois ? »

Elle ne put le définir d’aucune manière satisfaisante pour elle.

« Il pouvait encore être aimable, amical avec mon oncle et ma tante, lors de son dernier voyage à Londres, et pourquoi ne pas l’être avec moi ?… S’il me craint, pourquoi me venir voir ? S’il n’a plus aucun sentiment pour moi, à quoi peut-on attribuer son silence ?… Oh ! quel homme ! il m’impatiente, vraiment… ; je ne veux plus penser à lui. »

L’approche de sa sœur la força, pendant quelques instants, à garder sa résolution. Hélen la joignit d’un air riant, qui prouvait assez qu’elle était mieux qu’Élisabeth satisfaite de leur visite.

« À présent, dit-elle, que cette première entrevue est passée, je me sens tout à l’aise ; je connais mes forces et ne crains plus d’être embarrassée en le voyant ; je suis même contente qu’il vienne ici jeudi, alors tout le monde verra que nous nous rencontrons l’un et l’autre avec une parfaite indifférence.

— Oui, oui, vraiment, avec beaucoup d’indifférence, repartit Élisabeth en riant. Oh ! Hélen, prenez garde.