Ma chère Alicia, — Vous êtes trop bonne de vous préoccuper de[1] Frederica et je vous en suis reconnaissante comme d’une marque d’amitié ; mais comme je n’ai pas le moindre doute sur la chaleur de votre affection, je suis bien loin d’exiger un si lourd sacrifice. C’est une fille stupide, qui n’a rien pour la recommander. Je ne voudrais pas, par conséquent, à cause de moi, vous encombrer ne serait qu’un moment de votre précieux temps, en l’envoyant chercher rue Edward, d’autant que chaque visite va à l’encontre de la grande affaire d’éducation, que je souhaite vraiment favoriser en la laissant chez Mlle Summers. Je veux qu’elle joue et chante avec un minimum de goût et une bonne dose d’assurance, puisqu’elle a ma main, mon bras et une voix tolérable. J’ai été tellement gâtée durant mon enfance[2] que je n’ai jamais été obligée à faire attention[3] à quelque chose, et par conséquent suis sans les accomplissements qui sont maintenant nécessaires pour parfaire une jolie femme. Non pas que je sois un défenseur de cette mode qui prévaut et qui demande d’acquérir une parfaite connaissance de toutes les langues, les arts et les sciences. C’est gaspiller son temps que d’être maîtresse en français, italien et allemand ; la musique, le chant et le dessin, etc, apporterons à une femme quelques applaudissements, mais n’ajouteront pas un amant à sa liste — la grâce et les manières, après tout, sont de la plus haute importance.