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LE GÎTE.

— Pauvreté, pauvreté ! Sphinx au maigre visage,
Sibylle au manteau noir qu’interroge le sage,
Qui saura tes secrets ? Qui nous dira pourquoi
Pèse sur tant de fronts une pareille loi ?
Quand l’immense banquet ou la pâture abonde
Se dresse, et que tout rit aux princes de ce monde,
Qui nous dira pourquoi, seule, assise à l’écart,
Tu ronges les débris, s’il t’en reste une part ?
Ce temps plus qu’aucun autre a sondé le problème ;
Au bout de nos efforts il demeure le même.
Sans cesse renaissant et de tous redouté,
Il est là qui nous tient. Pauvreté, pauvreté !
Vieille mère en haillons, frissonnante et fiévreuse,
Dois-tu cesser un jour de tendre ta main creuse ?
Ou bien, comme il fut dit par le Maître divin,
Seras-tu parmi nous, mère, jusqu’à la fin ?

Adieu, triste maison, farouche hôtellerie
De tous les besaciers sans toit et sans patrie !
Adieu ! quand, sous le feu des candélabres d’or,
Les fêtes de l’hiver m’appelleront encor,
Quand je verrai les rois et les reines du monde
Entourer le festin et goûter à la ronde
Toutes les voluptés qu’apprête un art savant,