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AU CHASSEUR GUILLAUME.

S’y repaissait longtemps de la chair des victimes.

C’en est fait : nos vallons, par toi libres enfin,
N’auront plus à payer une dîme à sa faim.
Un bras a réprimé toute cette épouvante,
Et ce bras est le tien, jeune homme, et je t’en vante.

D’autres, le cœur ému d’une vaine pitié,
Regretteront peut-être un géant foudroyé ;
Diront qu’il était beau quand, d’une aile tendue,
Il allait mesurant en trois coups l’étendue ;
Quand, sublime, d’un vol circulaire et lointain,
On le voyait planer dans un ciel du matin ;
Ils diront que la force a partout son prestige,
Et qu’un oiseau qui monte au soleil sans vertige,
Et qui porte la foudre et qui sait l’affronter,
Tenait du ciel un droit qu’il fallait respecter.
Moi, je dis, insensible à ce droit dérisoire,
Que cet aigle n’était qu’un bandit dans sa gloire ;
Et qu’il vaut mieux le voir, chez toi, sur un bâton,
Fantôme rembourré de paille et de coton,
Laisser à l’avenir, sur nos toits verts de mousses,
Les petits passereaux chanter de leurs voix douces !