Page:Aventure n° 3, jan 1922.djvu/34

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la mesure (comme il arrive aux habitués des maisons de musique et de danse), était devenue le rythme de ses mouvements.

Je bus du cocktail vanté par Diana.

Mes lèvres ne s’étaient pas enthousiasmées à l’effleurer. L’été devenait un accablement, et mon habituelle idolâtrie des villes n’était plus assez forte pour vaincre un désir des campagnes très simples, où se boiraient des boissons vraiment fraîches, fruits pressés dans l’eau et sans chaleur d’alcool ; pour cette nuit et d’autres encore, le désœuvrement me condamnait à ce petit bar, où la torture des soifs compliquait sans s’apaiser le mélange de glace et des liqueurs. Quand j’entrai des professionnels exécutaient les pas à la mode. Serrés l’un contre l’autre, ils semblaient de petits crapauds collés pour quelque fornication. Autour d’eux une poussière, où il y avait de la poudre de riz et le malaise des parfums trop violents. Depuis quelques jours me poursuivait une odeur mêlée de sueur humaine et de bière fade. Ici des essences, peut-être agréables mais difficiles à supporter par cette température couvraient l’écœurement habituel, hurleuses d’appels exagérés. Paris tout était faisandé par la canicule et le vice exempt de beauté. L’été jouait faux entre les pierres grises des monuments, les squares desséchés et les avenues désertes. Les femmes paraissaient avoir taillé leurs lèvres trop molles à même les bâtons dont elles les rougissent à l’ordinaire, et lorsque avides, elles se collaient aux verres, on craignait de les voir s’y écraser.