Page:Avezac-Lavigne - Diderot et la Société du baron d’Holbach, 1875.djvu/111

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nait maintenant à l’écart. Marmontel attribue en grande partie sa retraite à un motif qui, s’il était vrai, ne donnerait pas une haute opinion du caractère du grand naturaliste. « Buffon, dit-il dans ses Mémoires, avec le cabinet du roi et son Histoire naturelle, se sentait assez fort pour se donner une existence considérable. Il voyait que l’école encyclopédique était en défaveur à la Cour et dans l’esprit du roi ; il craignit d’être enveloppé dans le commun naufrage ; et, pour voguer à pleines voiles, ou plutôt pour louvoyer seul prudemment parmi les écueils, il aima mieux avoir sa barque à soi, libre et détachée. » Toutefois, il ne faudrait pas prendre à la lettre cette imputation de l’auteur de Bélisaire, qui n’était pas en bons termes avec Buffon, dans lequel, par une injustice presque ridicule, il ne voyait qu’un bon poète descriptif. Du reste, Diderot et Buffon n’avaient pas rompu, et ils se visitaient quelquefois. « J’aime, écrit Diderot[1], les hommes qui, comme lui, ont une grande confiance en leur talent. »

C’est vers cette époque que Gœthe place la composition d’une des productions les plus originales de Diderot. Il croit que son Neveu de Rameau a été écrit en 1760, sous l’empire de l’irritation causée par la représentation de la comédie des Philosophes, de Palissot. Sans nous inscrire en faux contre la conjecture du premier des poètes allemands, nous croyons cette date un peu éloignée. Au cours de

  1. Lettre à mademoiselle Voland, 25 novembre 1760.