Page:Avezac-Lavigne - Diderot et la Société du baron d’Holbach, 1875.djvu/193

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Mais ces deux genres d’erreurs écartés, on remarque dans le livre du baron une tentative vraiment sérieuse, quoique prématurée : celle de fonder la morale sur la connaissance de la nature humaine, et d’éliminer les croyances théologiques comme ne pouvant plus lui servir de base.

« Une éducation raisonnable et fondée sur la vérité, fait-il remarquer, des lois sages, des principes honnêtes inspirés dans la jeunesse, des exemples vertueux, l’estime et les récompenses accordées au mérite et aux belles actions, la honte, le mépris, les châtiments rigoureusement attachés au vice et au crime, sont des causes qui agiraient nécessairement sur les volontés des hommes, et qui détermineraient le plus grand nombre d’entre eux à montrer des vertus. Mais si la religion, la politique, l’exemple, l’opinion publique travaillent à rendre les hommes méchants et vicieux ; s’ils étouffent et rendent inutiles les bons principes que leur éducation leur a donnés, si cette éducation elle-même, ne sert qu’à les remplir de vices, de préjugés, d’opinions fausses et dangereuses ; si elle n’allume en eux que des passions incommodes pour eux-mêmes et pour les autres, il faudra, de toute nécessité, que les volontés du plus grand nombre se déterminent au mal. Voilà, sans doute, d’où vient réellement la corruption universelle dont les moralistes se plaignent avec raison, sans en jamais montrer les causes aussi vraies que nécessaires. Ils s’en prennent à la nature humaine, ils la disent corrompue, ils blâment l’homme de