Page:Azaïs - Jugement philosophique sur J.J. Rousseau et sur Voltaire.djvu/30

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appartenait à son âme comme la passion de la gloire ; mais les travaux qui l’avaient conduit à la gloire étaient incompatibles avec la simplicité et le repos ; il ne voulait plus de la gloire ; il regrettait amèrement de l’avoir poursuivie ; il ignorait que si la paix et l’obscurité lui eussent été rendues, il se serait bientôt tourmenté de son inaction se la serait même reprochée comme coupable ; et lorsqu’il aurait eu repris dans la retraite l’ardeur de la célébrité, l’enthousiasme des choses frappantes, le besoin de les dire, il serait monté de nouveau sur la scène du monde, il aurait appelé les hommages et bravé les résistances, il aurait recommencé une carrière de gloire, d’infortune et d’agitation.

Disons-le maintenant : J.-J. Rousseau, fidèle par son sort à la loi commune, fut le plus heureux et le plus malheureux des hommes. Il en fut le plus heureux, car il goûta vivement les charmes de la nature ; il enflamma un grand nombre d’hommes, et par des moyens toujours intéressans et nobles ; il reçut les témoignages les plus flatteurs, les plus éclatants, plus sincères, de l’affection, de l’estime, de l’admiration, de l’enthousiasme ; enfin il conçut de grandes pensées, des sentimens profonds,