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en 1878, dans le cimetière de Sery-les-Méziéres, près Saint-Quentin, était ornée d’un panneau vitré dont les fragments, au nombre de vingt-six, ont été reconstitués en 1909 par M. Socard, peintre-verrier (fig. 2). Celui-ci a pu démontrer que l’ensemble des fragments, de couleur verte ou jaune, composait une grande croix pattée, cantonnée de fleurons et dont les bras tenaient suspendus l’Alpha et l’Oméga. Ces morceaux étaient réunis au moyen de plombs coulés, dont un fragment s’est conservé intact[1]. Il est probable que les plombs ont été employés tout d’abord pour enchâsser des morceaux de verre découpés et assemblés de manière à dessiner des figures géométriques : le verre mis en plombs a dû succéder immédiatement aux verroteries et aux grenats sertis dans les orfèvreries cloisonnées à jour des époques mérovingienne et wisigothique.

Dès le onzième siècle, l’emploi des vitraux en verres de couleur mis en plombs est entré dans le formulaire des ateliers monastiques, tant en Allemagne qu’en France.

Le moine Théophile, en écrivant son célèbre traité « Diversarium aritum schedula, consacre tout le deuxième livre de son ouvrage à la fabrication du verre et à celle des vitraux. Il expose exactement la façon de souffler le verre en plateaux circulaires, ou « boudines » et même en cylindres destinés à être étendus, à peu près comme on procède encore de nos jours. Il explique aussi les méthodes pour le colorer. Puis il entre dans tous les détails de la fabrication des vitraux, depuis le dessin, œuvre de l’artiste, exécuté sur une table de bois enduite de craie, à l’aide d’une pointe de plomb, jusqu’à la coupe du verre, au moyen d’un fer rouge qui déterminait une fêlure suivant le tracé relevé sur la table[2]. Il expose en détail la fabrication des grisailles vitrifiables employées pour le trait et la demi-teinte et décrit minutieusement le travail de peinture proprement dite. La construction du four, la cuisson, la préparation des vergettes d’assemblage en plomb fondu dans les lingotières ou aminci au rabot, le montage, la soudure et, enfin, la mise en place sont successivement passés en revue.

Le procédé enseigné par le moine Théophile est le même que celui décrit par Léon d’Ostie, à propos des grands travaux que l’abbé Didier fit faire au Mont-Cassin, vers la fin du onzième siècle : les fenêtres de la nef de la grande église furent garnies de verres assemblés dans des plombs et maintenus par une armature de bois renforcée de fer[3]. Ce même procédé a dû être employé à l’exécution des cinq

  1. Cf. l’étude de MM. Pilloy et Sourd dans le Bulletin Monumental, 1910, fasc. t. 2.
  2. L’emploi du diamant pour couper le verre ne remonte pas au delà du milieu du seizième siècle.
  3. Fenestras quidem quæ in navi sunt plumbo, simul ac vitro compactas tabulis ferro ligatis inclusii. (Chronicon casinense, livre III, chap. 12.)