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Nous l’ignorons encore. Il semble qu’elle ait coïncidé avec les progrès décisifs de l’architecture voûtée ; elle se trouve réalisée dans le premier quart du douzième siècle. L’église où nous trouvons les premiers vitraux qui forment tout un enseignement théologique en images lumineuses est aussi celle où, pour la première fois, le nouveau système des voûtes « d’ogive » a été appliquè à un édifice très grand et très riche : c’est la basilique de l’abbé Suger, à Saint-Denis. Il reste des vitraux donnés par Suger, vers l140, quelques panneaux, dont l’un porte l’effigie du célèbre abbé.


Les plus anciens vitraux du douzième siècle nous apparaissent déjà dans toute la splendeur de leur coloration harmonieuse et puissante, témoignant d’une technique très avancée.

On peut citer parmi les plus remarquables après ceux de Suger à Saint-Denis : les apôtres de l’Ascension, la fenêtre de saint Gervais et saint Protais, au Mans ; la Vierge de l’église de la Trinité, à Vendôme ; les verrières de la galerie du chœur, à l’église Saint-Remy, de Reims ; plusieurs sujets provenant de Châlons-sur-Marne et actuellement conservés au Musée des Arts décoratifs ; la grande verrière de la Passion, de Poitiers ; celle de la façade de la cathédrale de Chartres et celle de la nef de la cathédrale d’Angers. Un très précieux vitrail du douzième siècle est encore conservé dans la modeste église du Champ, au centre de la vallée du haut Grésivaudan (Isère) (fig. 3). Enfin notre cathédrale lyonnaise de Saint-Jean nous offre dans la verrière de saint Pierre un beau spécimen de l’art du douzième siècle.

À cette époque, où les monastères étaient à peu près le seul refuge des sciences et des arts, la tradition byzantine se reflète sur les verrières. La simplicité des compositions et des mouvements, l’expression calme des figures sont inspirées d’un sentiment religieux très profond. Les sujets, généralement de petite dimension et inscrits dans des médaillons, s’enlèvent en coloration franche, mais toujours harmonieuse, sur des fonds, parfois d’un rouge éclatant et marbré, le plus souvent d’un bleu légèrement violacé, d’intensité variée.

À côté de ces vitraux chaudement colorés, le douzième siècle en a produit de très différents. En effet, une délibération du Chapitre général, en 1134, interdit l’emploi des verres de couleur dans tous les monastères soumis à la règle de saint Bernard. Les vitraux devaient être « de couleur blanche, sans croix ni ornements ». Obéissant à l’austère influence du grand réformateur de leur ordre, les moines cisterciens