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MILLE ET UN JOURS

Kluss. D’abord, il fut moins longtemps avec nous, et il fut au secret la plus grande partie du temps.

Nous avons toutefois gardé de cet excellent député allemand un bon souvenir, et en plus la copie d’une lettre qu’il avait adressée à l’empereur. Cette lettre, véritable chef-d’œuvre, est le résumé de tout ce qu’un homme talentueux, et de sa nuance politique, peut accumuler d’arguments contre le système de gouvernement autocratique tel que pratiqué en Allemagne. J’ignore si c’est cette lettre qui lui valut plus tard son élargissement.

Quant à M. Kluss, il fut notre compagnon de captivité pendant beaucoup plus longtemps. Plus ou moins lié avec tous les prisonniers, il errait nonchalamment d’une cellule à une autre pour le plaisir de causer, et sa conversation était des plus intéressantes. C’était un homme très instruit, érudit même. Nous avons bien des fois, et durant de longues heures, causé avec lui des institutions politiques de l’Allemagne.

Durant la captivité de cet intéressant député, il s’est passé un incident qui mérite d’être relaté. Nous avions chaque année, à la prison, la visite du général Commandant de la ville de Berlin. À cette époque, c’était le général Von Boehm, un homme d’environ 70 ans, et sourd comme un pot.

Le général nous était arrivé au cours de la matinée, entouré de ses myrmidons, c’est-à-dire un colonel, une couple de majors, quelques capitaines, et